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Jurisprudence et garantie décennale : un vaste sujet que nous tentons d'expliquer

Entre la législation et la pratique professionnelle, entre les assurés et les assureurs, ce sont les Hauts Magistrats qui fixent les interprétations permettant de trancher les litiges. La difficile interprétation des articles articles 1792 et suivants du code civil et les différents revirement de jurisprudence font qu'il est clairement difficile de se positionner avec certitude sur un sinistre complexe. La vérité d'un jour n'est jamais celle de toujours en décennale, il est donc intéressant de suivre l'évolution des différentes décisions de justice faisant jurisprudence. 

La jurisprudence est constituée par un ensemble de décisions de justice qui interprètent un point de droit de façon cohérente. C'est là qu'intervient la notion de hiérarchie entre les juridictions : une solution juridique pourra plus certainement «faire jurisprudence», lorsqu'elle émanera des plus hautes juridictions, même si l'initiative de la solution provient de juridictions inférieures, en particulier des cours d'appel.

Dans un arrêt du 14 mai 2013, la Cour de cassation a jugé qu'une police de responsabilité civile professionnelle ne peut pas couvrir la responsabilité contractuelle de l'entreprise vis-à-vis du maître d'ouvrage.

Un maître d'ouvrage entreprend la construction d'ateliers et de bâtiments de stockage et confie à la société X la réalisation de la charpente métallique et de la couverture. De nombreuses non-conformités et malfaçons étant constatées en cours de travaux, le maître d'ouvrage sollicite la désignation d'un expert judiciaire, qui chiffre les travaux de reprise à 79 965 €. Le maître d'ouvrage décide alors d'engager une action judiciaire. En première instance, il obtient gain de cause, les juges considérant que la responsabilité décennale de la société X peut être légitimement mise en oeuvre. L'assureur de la société X, condamné avec son assuré, fait appel. Entre-temps, la société X est mise en liquidation judiciaire. La décennale ne joue pas La cour d'appel de Poitiers infirme le jugement, tout en retenant que l'ensemble des désordres constatés « sont imputables à des défauts de mise en oeuvre par la société X sur les éléments de bardage, couverture et zinguerie et que ces manquements aux règles de l'art caractérisent manifestement une faute contractuelle de nature à engager la responsabilité de la société X, selon les règles de droit commun ». Constatant l'absence de réception expresse ou tacite, la cour d'appel écarte néanmoins l'application de la responsabilité décennale.

GARANTIE DECENNALE ET VENTE APRES ACHEVEMENT : Cass., 3e ch. civile, 2 octobre 2002, n° 1428 FS-P + B ; Bondu contre AGF et autres

Est réputé constructeur toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire. Elle est tenue à la garantie décennale en cas de désordres mettant en cause la solidité de l'immeuble.

Les faits

Le propriétaire d'un pavillon y fait effectuer, en 1987, des travaux importants (démolition et reconstruction de la façade et application d'enduits), qui relèvent du gros oeuvre. Deux ans plus tard, il le revend à un couple. Les acheteurs se plaignent de désordres, mettent en cause le vendeur et l'assignent. Dans l'intervalle, l'entreprise qui a réalisé les travaux est tombée en faillite.

La décision

La cour d'appel de Versailles condamne le vendeur, solidairement avec l'assureur de l'entreprise ayant réalisé les travaux, à réparer les désordres et à indemniser le couple d'acheteurs des dommages qu'ils ont subis. Selon l'article 1792-1 du code civil, est réputée constructeur la personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire. Aucun texte ne limite l'application de ces dispositions aux ventes intervenant immédiatement après achèvement. Il est responsable de plein droit des dommages de nature décennale qui avaient compromis la solidité du pavillon. Rejet du pourvoi du vendeur. La Cour de cassation déclare que la cour d'appel a fait application à bon droit de la garantie décennale à l'égard du vendeur du pavillon.

(Cass., 3e ch. civile, 2 octobre 2002, n° 1428 FS-P + B ; Bondu contre AGF et autres.)

> Notre commentaire

Il est établi que les malfaçons constatées compromettent la solidité de l'immeuble et qu'elles relèvent incontestablement de la garantie décennale. L'entreprise étant défaillante, son assureur est appelé en garantie. Il réplique par une mise en cause du vendeur sur la base de l'article 1792-1-2° du code civil. Celui-ci répute constructeur toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a même fait construire et le rend responsable de plein droit des dommages de nature décennale. Cette décision sanctionne les maîtres d'ouvrage, souvent simples particuliers, qui rénovent des immeubles dans le but de les revendre. Il s'agit néanmoins d'une condamnation " in solidum " : les victimes se verront indemniser par l'assureur RC décennale de l'entreprise disparue.

extension du champ d'application de la garantie décennale : Civ.3e, 26 octobre 2017, 16-18.120

Faits En 2006, les propriétaires d'une maison font installer une cheminée sur leur toit par une société spécialisée. En 2008, un incendie ravage leur habitation. Partiellement indemnisés par leur assureur, ils assignent en complément d'indemnité ce dernier, le prestataire (intervenu pour l'installation de la cheminée) et son assureur. En appel, les juges du fond condamnent l'assureur du maître d'oeuvre au titre de la réparation des dommages matériels. Ce dernier se pourvoit en cassation.

Décision Le pourvoi est rejeté. Pour la Cour de cassation la garantie décennale de l'assureur du maître d'oeuvre est due.

 

Commentaire

En vertu de l'article 1792 du code civil, tout constructeur intervenant sur un chantier peut voir sa responsabilité décennale engagée lorsque la solidité de l'ouvrage est compromise ou un des éléments ou équipements installés le rendent impropre à sa destination. En l'espèce, la Haute Cour devait déterminer si les désordres affectant une cheminée, élément d'équipement installé sur une construction existante, pouvait relever de la garantie décennale. Par une décision publiée au bulletin, elle confirme son revirement de jurisprudence. Elle n'opère plus de distinction que l'élément soit dissociable ou non; d'origine ou préexistant : les désordres affectant l'élément relèvent de la garantie décennale lorsqu'ils « rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination » (en ce sens Civ.3e, 15 juin 2017, 16-19.640 ; Civ.3e, 14 septembre 2017, 16-17.323). En l'espèce, l'incendie résultait d'une absence de conformité de l'installation aux règles du cahier des clauses techniques.

Les dommages affectant une installation frigorifique considérée « en elle-même » comme un ouvrage peuvent être couverts par la garantie décennale.

Civ.3e, 7 novembre 2012, pourvoi n°11-19023

 

Les faits

Pour agrandir la surface de vente de ses locaux commerciaux, une société (Romanis) fait réaliser des installations frigorifiques comportant une salle de machines et des tuyauteries alimentant des chambres froides et des vitrines d'expositions. Après avoir été conçus par un bureau d'étude, les travaux sont confiés à une entreprise spécialisée puis réceptionnés avec réserves, du fait de plusieurs dysfonctionnements. La société Romanis assigne l'installateur et le bureau d'étude en réparation des préjudices.

La décision

La cour d'appel de Grenoble rejette sa demande, retenant que l'installation frigorifique, « dont la vocation est essentiellement commerciale » ne relevait pas de la garantie décennale. Pour motiver leur décision, les juges se sont appuyés sur un rapport d'expertise qui constatait que « la dépose, le démontage ou le remplacement de cette installation pouvait s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière et que les éléments d'équipement sont dissociables ».

L'arrêt est cassé : il fallait rechercher si l'installation ne constituait pas « en elle-même un ouvrage » avant d'écarter la responsabilité décennale de l'installateur, et donc sa garantie.

Le commentaire

La jurisprudence joue un rôle considérable dans l'application de la garantie décennale, notamment parce qu'elle précise au cas par cas la notion d'ouvrage. C'est le cas ici. Le critère de l'importance des travaux est toujours pris en compte. Parfois, des travaux très modestes peuvent être considérés comme la construction d'un ouvrage, tel fut le cas pour le raccordement d'un poêle à bois sur un conduit de fumée (Civ.3e, 9 février 2012 pourvoi n°09-71498). A l'inverse, la pose d'un habillage en marbre sur une cheminée ne le sera pas, faute d'être fixé « de manière indissociable au mur et n'avoir qu'un rôle esthétique » (Civ 3e, 28 mars 2012 pourvoi n° 11-12537). Rien n'est donc vraiment figé. La loi prévoit que plusieurs conditions doivent être réunies pour que la garantie décennale s'applique, à commencer par l'existence d'un contrat de louage, d'un constructeur et d'un ouvrage. Ensuite, le dommage doit porter atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à sa destination, c'est-à-dire inutile. En principe, les éléments d'équipement qui ne peuvent pas être démontés ou remplacés sans détériorer l'ouvrage qui leur sert de support relèvent de la garantie décennale, les autres non (cf le rapport d'expertise cité ci-dessus).

RC décennale : l'ouvrage non réceptionné n'est pas couvert CA de Pau, 25 juillet 2011, n°10/01876

Les faits

Après avoir confié des travaux de réhabilitation de sa maison à une petite entreprise de maçonnerie, la propriétaire constate sur expertise (amiable, puis judiciaire) qu'un mur porteur n'a pas été installé conformément aux règles de l'art. Elle assigne le maçon et son assureur (Areas Assurances) en réparation.

Décision

Le 25 novembre 2008, le tribunal de grande instance de Bayonne accueille la demande à l'encontre du maçon mais rejette celle dirigée contre l'assureur, considérant que les travaux n'ayant pas été réceptionnés par la propriétaire, la garantie de l'assureur n'était pas due.

La cour d'Appel de Pau confirme cette décision précisant que les travaux n'avaient pas été réceptionnés, même de manière tacite par la propriétaire.

Commentaire

Cette arrêt rappelle que la responsabilité décennale de l'entrepreneur n'est couverte par son assureur dommage ouvrage qu'à partir du moment où les travaux ont été réceptionnés (L242-1 du code des assurances). En effet, qu'elle soit faite par procès verbal ou de manière tacite, la réception marque le point de départ de la garantie décennale. Si elle est tacite, c'est au maitre de l'ouvrage de la prouver par tout moyen (prise de possession des lieux, paiement de la totalité des travaux, etc.).

Les juges précisent, ici, que la réception tacite doit être « un acte unique pour l'ensemble de l'ouvrage, ce qui exclut des réceptions par lots ». En l'espèce les travaux n'ayant pas été réalisés « conformément aux règles de l'art », le maçon a commis une faute engageant sa responsabilité civile, mais pas sa responsabilité décennale en tant que constructeur.

Sécheresse catastrophe naturelle et absence de responsabilité décennale : Civ.3e, 18 octobre 2018, 17-25.814

Faits En raison de la sécheresse, les propriétaires d'un pavillon constatent des désordres sur la façade de leur bâtiment. Consécutivement à une transaction passée avec l'assureur, ils font appel à un entrepreneur qui procède à des travaux en sous-oeuvre, préconisés par l'expert judiciaire. Six ans plus tard, les désordres sont attribués à la persistance d'un état de sécheresse. Les propriétaires assignent la société de construction, son assureur décennal et leur nouvel assureur MRH, en indemnisation. En appel, leur demande est rejetée. Un pourvoi est formé.

Décision Selon les propriétaires, la survenance - après réalisation de travaux de reprise - de désordres affectant les parties d'origine d'un ouvrage, n'est pas de nature, à elle seule, à exclure la responsabilité de l'entrepreneur. Ils mettent également en exergue que le constructeur a manqué à son obligation de conseil et d'information. Le pourvoi est rejeté.

Commentaire
En vertu de l'article L.125-1 du code des assurances, c'est la garantie "catastrophe naturelle" qui garantit les désordres consécutifs à la sécheresse. Et selon l'article 1792 du code civil, l'entrepreneur qui intervient sur un chantier peut voir engager sa responsabilité décennale, si des désordres affectent la solidité de l'ouvrage ou les éléments le constituant le rendent impropre à destination.

Après avoir approuvé le raisonnement des juges du fond - relevant d'une part que les travaux exécutés par l'entrepreneur ont stabilisé les désordres initiaux et qu'un nouvel épisode de sécheresse, postérieur aux travaux, constituait la cause exclusive du sinistre - la Haute juridiction retient que la responsabilité du maître d'oeuvre ne peut être retenue sur le fondement décennal, ni contractuel au titre d'une violation de son devoir d'information et de conseil.

Assurance construction : un phénomène cat' nat' exonère totalement le responsable : Civ. 3e, 6 mai 2014, n° 13-15.854

Les faits

L'assureur de responsabilité civile décennale d'un entrepreneur, en liquidation, intervenu en 1996 pour des travaux devant réparer des désordres affectant les fondations de la maison d'un couple de particuliers, est attrait en justice par ces derniers à la suite de l'apparition de nouveaux désordres en 2003. Les demandeurs sont déboutés devant la cour d'appel, qui retient l'existence d'un cas de force majeure exonératoire, ce que confirme la Cour de cassation.

La décision

La cour d'appel a souverainement retenu l'existence d'un cas de force majeure, constitué par larépétition de phénomènes météorologiques imprévisibles et irrésistibles comme cause déterminante des désordres. Elle a pu en déduire qu'en dépit des fautes relevées contre elle dans l'exécution des travaux limités dont elle avait été chargée, l'entreprise était exonérée de toute responsabilité dans la survenance des dommages.

Commentaire

En la matière, la jurisprudence est fluctuante et a pour particularité de cristalliser un croisement alternatif entre l'assurance décennale des constructeurs et la garantie du régime spécifique d'indemnisation des catastrophes naturelles. Cependant, si la force majeure constituée par un évènement cat nat exonère le constructeur, il est surprenant de constater que l'arrêté cat nat n'a pas nécessairement cet effet. Par exemple, un assureur de dommages-ouvrage «tenu à la garantie décennale qui s'étend au vice du sol, devait, pour s'exonérer de sa présomption de responsabilité, démontrer la force majeure et a pu retenir que celle-ci ne résultait pas de la simple constatation administrative de l'état de catastrophe naturelle donnée à un événement» (Civ. 3e, 1er décembre 1999, n° 98-10.106).

Désordres décennaux - Travaux de reprise

Les faits

Des fissures dues à un tassement des fondations affectant la maison d'un couple de particuliers apparaissent après que des travaux de reprise, financés par l'assureur dommages-ouvrage, ont été réalisés. Ce dernier refusant de prendre en charge le sinistre, les propriétaires l'assignent en justice, avec la société qui a procédé aux travaux de reprise, sur le fondement de la responsabilité civile des constructeurs (article 1792 du code civil). Les plaignants sont déboutés de leur demande par la cour d'appel, qui nie le caractère décennal des travaux de reprise, lesquels « ne constituent pas la cause des désordres actuels, qui sont la suite directe du sinistre initial qui se poursuit ». La cassation est obtenue, au visa de l'article 1134 du code civil (force obligatoire des contrats), au titre de l'assurance dommages-ouvrage.

 

La décision

Selon le rapport d'expertise déposé dans le délai décennal, les efforts imposés à l'ouvrage conduisaient inexorablement à sa ruine, sa solidité étant d'ores et déjà compromise. L'indemnisation est due par l'assurance dommages-ouvrage.

 

Commentaire

Le rapport d'expertise précisait que les travaux de reprise avaient été mal exécutés (« erreur de conception des micropieux »). Ce rapport « clair et précis » s'imposait aux juges du fond, qui ne pouvaient pas le dénaturer. Ce désordre, qualifié ainsi de décennal, devait donc être indemnisé par l'assureur dommages-ouvrage, qui doit garantir l'efficacité des travaux de reprise (Civ. 3e, 7 décembre 2005, n° 04-17.418).

Responsabilité personnelle des dirigeants en cas de non souscription à une assurance décennale : Civ. 3e, 10 mars 2016, n° 14-15.326

Les faits

Une société civile immobilière (maître de l'ouvrage) fait appel à une entreprise (maître d'oeuvre) pour la construction de cinq chalets. Des désordres sont constatés qui conduisent le maître de l'ouvrage à assigner l'entreprise de bâtiment en indemnisation. Cette dernière étant placée en liquidation judiciaire, la sci poursuit son action à l'encontre du dirigeant, à titre personnel. Ce dirigeant est condamné, en appel, sur le fondement d'un défaut de souscription d'assurance de responsabilité décennale des constructeurs. Le pourvoi en cassation du mandataire social est rejeté.

La décision

Le gérant « qui n'avait pas souscrit d'assurance décennale, avait commis une faute intentionnelle, constitutive d'une infraction pénale, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il avait commis une faute séparable de ses fonctions sociales et engagé sa responsabilité personnelle ».

Commentaire

La faute séparable des fonctions est une construction jurisprudentielle qui permet de poursuivre une action à l'encontre de la personne du dirigeant d'une entreprise et notamment d'atteindre son patrimoine personnel. Alors que la souscription de l'assurance RC décennale est la terre d'élection de la reconnaissance de la faute détachable (voir : Com., 28 septembre 2010, n° 09-66.255), récemment la Cour de cassation l'a étendue à la souscription à une assurance de responsabilité civile obligatoire pour une activité de parapente (Com., 27 mai 2015, n° 13-23772). Voir : « L'obligation d'assurance, l'épée de Damoclès du dirigeant », L'Argus, n° 7448, par Stéphane Choisez.

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